Au bout d’un match au suspense insoutenable, le Stade Rochelais a remonté un retard de trois essais pour venir à bout d’une équipe paloise extrêmement réaliste et dangereuse jusque dans les derniers instants. Grâce à cette victoire, La Rochelle distance son adversaire du jour de 6 points et consolide sa position en haut du classement.
Une possession stérile contrée par Pau
Dès le début du match, les Rochelais monopolisent le ballon, décident d’aller en touche grâce à des fautes paloises et campent les 22m adverses. Les Béarnais font une nouvelle fois face à leur indiscipline chronique et sont rapidement menés 6-0 après deux coups de pied de Fortassin, alors que La Rochelle joue contre le vent en première mi-temps. La conquête est solide et prive les Palois du moindre ballon d’attaque, mais le premier coup du sort intervient : après un dégagement de Berger contré, l’ailier Elijah Elia Niko suit et va marquer les premiers points de Pau qui n’a quasiment pas mis la main sur le ballon (6-7, 13e). Malgré un jeu au pied inopportun face au vent qui rend le ballon à l’adversaire, les Rochelais continuent à enchaîner les séquences dans le camp béarnais et se nourrissent des nombreuses fautes paloises pour hors-jeu, sanctionnées d’un carton jaune pour Jean Bouilhou qui permet à Fortassin de faire repasser son équipe en tête (9-7, 16e). Après une pénalité réussie par Lescalmel pour ballon gardé au sol, les Palois vont rapidement marquer un deuxième essai contre le cours du jeu par Niko après une mêlée et une passe somptueuse de Moa vers l’aile dégarnie par la défense rochelaise. À la 28e, ça fait 9-15 pour Pau qui fait preuve d’une réussite insolente. Sur cette domination stérile, Fabrice Ribeyrolles commente : « Sans être géniaux, on porte le ballon, on prend des points sur leur indiscipline, mais on fait rien d’extraordinaire et donc on s’expose à des contres ».
La monopolisation du ballon par les Jaune et Noir aura donc été vaine et les Rochelais commencent à douter et vont déjouer en cette fin de première période. Les Palois commencent à prendre le dessus dans les impacts et compliquent la tâche maritime dans les rucks, les Rochelais jouent à plat et voient leur conquête disputée, à l’image de la touche perdue à 5m de l’en-but adverse (30e). Les Jaune et Noir doutent et commettent des erreurs sous les ballons hauts, notamment les chandelles, lorsque Cestaro, gêné par le soleil, commet un en-avant, ou encore les renvois avec le ballon mal maîtrisé par Cedaro et Atonio qui se gênent en début de seconde période. Pau se nourrit de ces erreurs, commence à gagner des ballons et des lancements de jeu et se montre alors plus tranchant : Moa accélère le jeu, joue rapidement une pénalité sur les 22m rochelais et négocie parfaitement un 3 contre 2 qu’Acébès conclue d’un essai (12-20, 39e). Moa et Niko ont dynamisé le jeu dans cette première période et parfaitement contré une équipe Jaune et Noire en demi-teinte qui rejoint les vestiaires frustrée.
23 hommes en colère
Au retour des vestiaires, les Rochelais sont revenus révoltés et bien décidés à remporter une rencontre qui leur échappait de manière cruelle. Nul doute que le discours des coaches à la mi-temps aura été décisif. À ce titre, Fabrice Ribeyrolles confie : « On a insisté sur le fait qu’on manquait d’intensité. Chez eux, quand on met de l’application dans les rucks pour prendre de la vitesse, dès qu’on accélère, ça marche ; mais on l’a pas assez fait. On savait qu’avec le vent dans le dos on pouvait les mettre sous pression. » Et Patrice Collazo de conclure : « À trois essais à zéro, je connais beaucoup d’équipes qui auraient abandonné. » Ce sont donc 23 joueurs rochelais en colère contre leur prestation et la tournure du match, et transcendés par un public énorme qui n’a jamais abdiqué qui sont revenus sur la pelouse. Après un début de période difficile toujours dominé par Pau (faute sur mêlée, deux renvois mal contrôlés), la machine rochelaise s’est remise en route. Petit à petit, les Rochelais dominent les rucks et mettent à nouveau les Palois à la faute (carton jaune pour Fumat), permettant aux Rochelais de revenir dans la partie (15-20, 50e). Sans être outrageusement dominatrice, « la mêlée nous a permis de rester dans le match » analyse Patrice Collazo. Comme contre Lyon, en finale à Brive il y a 4 ans, lorsque La Rochelle était déjà menée 15-20 et 3 essais à 0 à la mi-temps. Comme contre Lyon, les supporters ont été exceptionnels, n’ont jamais abdiqué et ont fait sentir tout au long du match qu’ils étaient derrière leurs joueurs. Leandro Cedaro en parle : « Le public ne m’a pas surpris. Dans la défaite comme dans la victoire ils sont toujours là, et ça fait plaisir. En deuxième mi-temps, le public c’est dans la tête, dans l’état d’esprit qu’il nous aide, mais les fautes techniques c’est pour nous. Dans les bons et les mauvais matchs ils sont toujours là, et ça fait vraiment plaisir. » Comme contre Lyon, les Rochelais ont effectué une très bonne seconde période pour remonter un énorme retard. Un signe ?
Les Jaune et Noir profitent de cette supériorité numérique pour reprendre des couleurs et jouer en avançant, à l’image de Fortassin qui envoie un Cedaro lancé perforer la défense béarnaise. Les Palois sont dépassés par la vitesse des Maritimes, notamment grâce à des rucks bien plus maîtrisés en seconde période permettant des libérations rapides et des turnovers grâce à des contests de Djebaïli notamment. Sur une touche aux 40m, Berger dynamite la défense paloise, écarte le ballon à gauche pour Atonio qui claque la passe pour Lagarde ; le ballon rebondit côté droit pour Vulivuli qui perce et donne à Fortassin qui fait une passe sur un pas pour Herry, qui file entre les poteaux (22-20, 57e). Sur sa performance, Berger, très bon ce samedi soir, se veut perfectionniste : « C’est mitigé. Il y a eu quelques bons trucs c’est vrai, mais je me fais contrer (sur le premier essai palois). Et à ce niveau-là, j’ai pas le droit de me faire contrer. Je vais revoir ma prestation demain (dimanche) et on va travailler ça à l’entraînement ». Son entraîneur Fabrice Ribeyrolles se montre plus élogieux à l’égard de la charnière : « Julien (Berger) a fait un très bon match, il a mis de la vitesse grâce à de bonnes libérations. Il a fait individuellement une très grosse performance. (Sur son coup de pied contré) Je lui en tiens pas rigueur, il est encore jeune, des erreurs tout le monde en fait, mais il la rattrape largement à côté. Fabien (Fortassin) a également fait de bonnes choses. Malgré quelques erreurs dans le jeu au pied, c’est le métronome du jeu rochelais ». Ce dernier a d’ailleurs été élu homme du match par le staff, réussissant tous ses coups de pied et auteur de 23 points. Sur la fin de match, Pau semble un peu mieux physiquement et profite du carton jaune de Van Vuuren pour garder la possession du ballon et se montrer dangereux. Manca marque une pénalité suite à une action dangereuse sur le côté droit de la défense rochelaise (28-23, 74e), et permet à son équipe de ramener un bonus défensif.
Le point noir du match : les blessures
Cette belle victoire a été quelque peu ternie par les blessures de Gourdon (remplacé à la mi-temps par Kieft pour une douleur au mollet) et Lebail (blessé à la cheville en toute fin de match). Déjà compliquée avant le match par l’indisponibilité de Le Bourhis (malade), la composition des lignes arrières devient un casse-tête. Fabrice Ribeyrolles confirme : « Les blessures vont encore remplir l’infirmerie, c’est le gros point noir de ce soir (samedi). On jongle avec toutes les blessures, on a du mal à composer une ligne de trois-quarts. Heureusement, Sireli Bobo va apporter une solution offensive intéressante. » Aux Rochelais maintenant de se remobiliser pour un déplacement compliqué à Carcassonne le week end prochain, contre une équipe qui joue sa survie en Pro D2.
N.C.